Encore de drôles de marchés publics…

J’ai déjà épinglé les nombreuses irrégularités et les très sérieux manquements qui ont affecté le marché de « création et de lancement d’un gentilé pour l’Ille-et-Vilaine », conclu le 18 avril 2013 par le Conseil général avec la société GFT dirigée par Monsieur Jacques Delanoë, pour un montant de 15.000 euros HT.

C’est ici.

De fil en aiguille, j’en suis venu à m’intéresser aux marchés qui ont été passés par le Conseil régional avec cette même société ces dernières années.

Par courriers du 24 mars 2015, j’ai donc sollicité du Conseil Régional communication de documents administratifs concernant les marchés adaptés et à bons de commande référencés 2011-90693 (lot n° 2) et 2014-90015.

Il s’agit de marchés de : « conseil stratégique sur l’image de la collectivité, de son exécutif, de la Bretagne au travers de la perception des politiques publiques mises en œuvre auprès de l’opinion publique ».

Le premier, d’un montant maximum annuel de 30.000 euros HT, conclu le 27 décembre 2011 avec le seul candidat ayant déposé une offre, reconductible une fois, a été reconduit pour un nouveau montant de 30.000 euros HT jusqu’au 27 décembre 2013, par courrier de notification en date du 10 décembre 2012 sous cette formule d’appel assez peu administrative :

Cher_Jacques

Le second, d’un montant maximum de 15.000 euros HT autorisant qu’il soit passé sans publicité ni mise en concurrence, a été conclu dans la foulée – par les mêmes signataires et pour exactement le même objet – le 24 janvier 2014, pour une période allant jusqu’au 31 décembre 2014 : une manière de reconduire ce qui n’était plus reconductible.

Je passe sur les détails, mais je vous assure que ce n’est vraiment pas sans peine que je suis parvenu à obtenir les 6 et 7 mai 2015 les documents sollicités… à l’exception notable toutefois des « livrables » que j’ai pourtant re-demandés à plusieurs reprises, en précisant – je cite – qu’ils gagneraient en lisibilité s’ils étaient accompagnés des « bons de commande », contractuellement prévus.

Je rappelle que la loi du 17 juillet 1978 a consacré le droit d’accès des citoyens à tous ces documents sous un délai d’un mois. Nous en sommes très loin !…

Devant mon insistance, par courrier R/AR daté du 12 juin 2015 qui me parvient ce jour, le Secrétaire Général du Conseil régional vient de me communiquer – au lieu et place des « livrables » sollicités – des documents qualifiés de « bons de commande », en me précisant simplement (sans rire) que l’ensemble est « relatif à des rendez-vous, séances de média-training, consultations ».

J’ai le regret de constater en premier lieu que ces documents ne sont – ni de près ni de loin – des « bons de commande » comme il est prétendu, puisque ce sont clairement des documents de liaison à vocation purement interne, visant à provoquer périodiquement des mandatements via le service de la comptabilité. Ils n’ont strictement rien à voir avec la vocation et le contenu des « bons de commande » qui ont été précisément décrits dans les marchés.

J’apprécie peu que l’on tente de me faire prendre des vessies pour des lanternes.

Je constate en second lieu que – sans que soit avancée la moindre raison – les « livrables » instamment sollicités ne me sont toujours pas communiqués, alors qu’il est pourtant clair que :

  • pour le marché 2011-90693 (lot n° 2), « le titulaire du présent lot sera chargé de conseiller la Région Bretagne sur la création, la modification et l’évaluation d’outils de sondages et de veille de l’opinion publique. En s’appuyant sur ces outils et sur tous les moyens mis à sa disposition par la Région, le titulaire sera chargé de remettre à la Région des analyses thématiques de l’opinion publique. Le titulaire élaborera également des notes de recommandation pour conseiller la Région dans sa stratégie de communication (dont sa stratégie relations presse). Il pourra être sollicité pour apporter des avis et des préconisations sur des projets de la collectivité. »
  • pour le marché 2014-90015, « le titulaire rédigera mensuellement une synthèse de ses interventions qu’il devra transmettre à la DIRCI »

Il me semble alors qu’il n’y a que deux hypothèses :

  • ou bien ces « livrables » existent, et le Conseil régional s’obstine à m’en refuser l’accès, en usant et abusant de manoeuvres dilatoires, semaine après semaine… ce qui constituerait, selon moi, un excès de pouvoir caractérisé relevant du tribunal administratif (après nécessaire avis de la CADA)
  • ou bien le Conseil régional ne peut pas me communiquer ces « livrables », du fait qu’ils n’existent pas… comme tend très clairement à le laisser penser l’assertion selon laquelle « l’ensemble des » faux « bons de commande » est « relatif à des rendez-vous, séances de média-training, consultations »

J’aimerais sincèrement pouvoir être démenti, mais j’avoue pencher très fortement pour la seconde hypothèse.

Après m’être fait promener pendant près de 3 mois, tout me porte à croire en effet que la société GFT a été rémunérée (au total et aux arrondis près) à hauteur de 75.000 euros HT, soit près de 90.000 TTC pendant 3 ans (sur la base de 897 euros TTC la journée et de 478,40 euros TTC, puis 526,26 euros TTC la demi-journée) pour des prestations prévues aux marchés qu’elle n’a pas exécutées.

Bien entendu, j’invite toute personne décelant une erreur factuelle dans mes propos à me la signaler à l’adresse : patrick.jehannin@gmail.com, de manière à ce que je puisse procéder volontiers et sans délai à toutes les corrections utiles.

Pour aller plus loin – marchés GFT : je saisis la CADA

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