Un coup à droite, un coup à gauche
J’ai été interpellé par la publication d’une photo postée par Marie Mesmeur (députée « La France Insoumise ») sur laquelle apparaît Tristan Lahais (membre du groupe « Génération-s » au conseil municipal de Rennes, de surcroît député membre du groupe « Ecologiste et Social »), suivie d’une réflexion de Loïck Le Brun (membre du groupe « Libres d’Agir » au même conseil municipal)
« Déjà, ça serait mieux de mettre son écharpe du bon côté !!! Faut vraiment tout vous dire !!!!! »
Postulant un choix délibéré, j’ai adressé un courriel à l’intéressé pour lui demander ce qu’il fallait en penser et, dans l’attente de sa réponse, j’ai essayé de me documenter.
Je trouve que la question est très intéressante car j’ai le sentiment qu’elle s’inscrit dans la question plus fondamentale de la séparation des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif.
En effet, selon moi, le décret n° 2000-1250 du 18 décembre 2000 « modifiant l’article D.2122-4 du code général des collectivités territoriales » n’impacte juridiquement que les élus locaux.
Il précise que « L’écharpe tricolore peut se porter soit en ceinture soit de l’épaule droite au côté gauche. Lorsqu’elle est portée en ceinture, l’ordre des couleurs fait figurer le bleu en haut. Lorsqu’elle est portée en écharpe, l’ordre des couleurs fait figurer le bleu près du col, par différenciation avec les parlementaires. »
A supposer même que ce décret emporte plus qu’une simple allusion aux insignes portées par les parlementaires, ceci ne concernerait à mon humble avis que la question des couleurs.
A ce stade, je pense que l’on peut certes reprocher à Tristan Lahais d’avoir porté l’écharpe municipale « à l’envers » lors du parrainage républicain de deux enfants arméniens le 24 avril 2019 :
Mais je ne vois pas comment lui reprocher de porter l’écharpe parlementaire « à l’envers » d’un texte qui n’existe pas !…
En effet, c’est le règlement intérieur de chacune des Assemblées qui prévoit le port des insignes par les parlementaires et en l’occurrence celui de l’Assemblée nationale pour les députés.
Ce règlement est propre à chaque assemblée issue d’un nouveau régime et celui qui s’applique actuellement est celui de la Vème République, déjà plus de 70 fois modifié.
Il n’y a aucune continuité normative avec le règlement intérieur de l’Assemblée Constituante de 1848, qui est à ma connaissance le seul à avoir prévu en son article 72 que : « dans les cérémonies extérieures, les représentants portent, en outre, une écharpe tricolore à franges d’or suspendue à l’épaule droite et passant sous le bras gauche ».
Sauf erreur de ma part – que l’on voudrait bien me démontrer – la seule disposition en vigueur actuellement est donc l’article 160, qui stipule simplement que : « Des insignes peuvent être portés par les députés, lorsqu’ils sont en mission, dans les cérémonies publiques et en toutes circonstances où ils ont à faire connaître leur qualité. La nature de ces insignes est déterminée par le Bureau de l’Assemblée ».
Je n’ai pas trouvé de décision du Bureau à ce sujet, mais de toutes manières : il ne faut évidemment pas confondre la question de la nature avec la question du port.
Après, on peut évidemment discuter de l’importance des traditions.
Je sais bien que tout le monde s’en fiche, mais au moins… moi, je me suis instruit !… 😉 😉 😉 😉 😉


De source sûre, et comme en témoignent d’autres photos du même évènement, je peux préciser ce soir que l’inversion n’est qu’un effet de précipitation rapidement corrigé. Il faut bien reconnaître que les députés ne cessent de courir de toutes parts en ce moment…