Et un de moins….
Le Conseil Constitutionnel s’apprêtait à prononcer sa déchéance « de plein droit ».
Pour l’éviter, le député LREM de la 1ère circonscription d’Ille-et-Vilaine – Mustapha Laabid – définitivement condamné pour abus de confiance le 16 juin dernier après que son pourvoi en Cassation ait été retoqué, ne pouvait plus que démissionner.
Il vient de le faire ce jour en s’exprimant à cette occasion dans les termes suivants (voir la V.O.) :
« Que les élus doivent être exemplaires pendant l’exercice de leur mandat, nul n’en doute ! …/… Mais, à coups de dénonciations anonymes, il semble se dessiner une notion floue et dangereuse de rétroactivité de la probité et de la transparence. …/… On poursuit et on juge plus sévèrement quelqu’un, devenu élu, sur ses activités professionnelles ou personnelles antérieures à son élection. On demande, in fine, aux élus d’avoir été totalement vertueux, avant même de se présenter à des élections. Ainsi, on sort du seul camp juridique, de la règle et de la loi, pour rentrer dans la morale. »
Mustapha Laabid confirme là qu’il n’est pas que voleur, il est aussi menteur.
Car, contrairement à ce qu’il prétend, il n’a pas été poursuivi seulement pour des faits antérieurs à son élection. Il a été poursuivi pour un ensemble de faits, pour certains antérieurs et pour d’autres postérieurs à son élection.
En ce qui me concerne, je prends quelques exemples pour souligner qu’il a beaucoup de chance :
- Il n’a pas été condamné à rembourser à qui que ce soit le montant de ses détournements de fonds, qui ont été arrêtés à plus de 20.000 euros, car aucune institution ne s’est portée partie civile
- Il n’a été condamné qu’à une amende de 10.000 euros (ce qui ne l’a pas empêché de soutenir en Cassation que cette amende ne tenait pas compte de ses ressources !…)
- Il n’a pas été condamné à verser des dommages et intérêts pour couvrir le montant des frais engagés pour les procès (expertises, enquêtes, convocations des témoins…) et n’a eu qu’à régler un droit fixe de procédure qui est de 127 euros en première instance, de 169 euros en appel et de 211 euros en Cassation (compte non tenu d’un éventuel abattement en cas de paiement dans les 30 jours)
- Il n’a pas été condamné à verser des dommages et intérêts pour couvrir le préjudice moral subi par qui que ce soit
- Bénéficiant pendant 4 ans de la présomption d’innocence, il a continué à encaisser chaque mois de confortables indemnités parlementaires à hauteur d’environ deux fois et demi sa rémunération précédente, hors frais de mandat et avantages divers, et à conforter ainsi ses droits à la retraite sur une base de plus de 7.000 € bruts mensuels
- Il a certes écopé d’une peine de 3 ans d’inéligibilité, mais c’est moins que les 5 ans requis par le Ministère Public
- Il n’a pas été inquiété pour le délit de faux et usage de faux qu’il a avoué en première instance en reconnaissant à l’audience avoir établi et (tardivement) produit à la Préfecture un faux procès-verbal de dissolution de l’association et de dévolution des biens, doublé notamment d’une grossière usurpation de signatures
- La décision de la Cour Constitutionnelle ne sera en rien rétroactive (même pas à la date de sa condamnation définitive, le 16 juin 2021)
- Il avait déclaré s’être mis en disponibilité : nul doute qu’il devrait donc en principe retrouver rapidement du travail… 😉
- Les indemnités dues à ses trois collaborateurs qu’il va devoir licencier ne seront pas à sa charge, mais à la charge des contribuables
J’ajoute que :
- Nul ne saura jamais que penser du comportement de Mustapha Laabid au cours des années 2006 à 2014 qui sont légalement couvertes par la prescription
- Nul ne saura jamais la part de responsabilité de la trésorière de l’association, qui se trouve être opportunément sa compagne
Questions pratiques :
- Quelqu’un sait-il s’il est prévu un pot de départ en circonscription ? 😉
- Que pensez-vous de l’idée de lancer une cagnotte pour amortir la chute ? 😉
- Une petit coucou à Richard Ferrand ? 😉
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Si besoin, voir au bout de ce lien près d’une centaine de contributions de ma part à ce sujet.
Une très bonne nouvelle dont on peut t’attribuer une part importante dans le dénouement.
Merci pour ton travail de « veille active ».
Merci de ce commentaire.
Je ne sais pas apprécier l’importance de ma contribution, mais je suis heureux de ne pas avoir faibli.
Je sais aussi que depuis un mois ou deux, d’autres que moi – qui ont eu la gentillesse de me tenir informé – sont intervenus auprès de Richard Ferrand, d’Eric Dupont-Moretti, de Christophe Castaner et de leurs collaborateurs (en général sans recevoir de réponse).
Grandeur… et décadence…
On ne va pas beaucoup en entendre parler de cette « affaire » dans les médias nationaux…
Et, surtout, heureusement que vous êtes là pour faire le travail de tout bon citoyen, d’autant plus que je suis moi-même président d’une asso (on fête nos 20 ans cette année !) et que j’ai trouvé toute cette histoire, et bien sûr son origine, lamentable…
Cordialement
A présent : guettons le journal officiel de demain, car – si Mustapha Laabid a présenté sa démission au Président de l’Assemblée Nationale (et non au Président du groupe LREM) – il devrait y avoir un avis demain ou au plus tard après-demain.
De sorte que le Conseil Constitutionnel n’aurait plus qu’à acter que la demande de déchéance est devenue sans objet.
Dans l’argument employé: on juge sur l’activité antérieure à la représentation élective, il est curieux que l’on puisse même s’y présenter en se sachant fautif, ne faut-il pas faire comprendre à tous les candidats qu’il faut être « totalement vertueux » pour oser faire campagne?
La position de la Cour d’Appel, qui n’a fait que confirmer celle du tribunal correctionnel, est soutenue par le fait que « la société est en droit d’attendre d’un président d’association recevant des fonds publics, comme d’un élu de la République, la plus parfaite probité ».
Extraits du jugement :
« Attendu que les faits reprochés à Mostapha LAABID sont graves, s’agissant de détournement à des fins personnelles ou indus de fonds perçus par une association œuvrant dans le domaine social au profit des plus démunis et ce d’autant plus, que sur une partie de ces faits, Mostapha LAABID était élu de la République, alors que la société est en droit d’attendre d’un président d’association recevant des fonds publics, comme d’un élu de la République, la plus parfaite probité
…/…
Attendu qu’au regard de la gravité des faits commis qui contribuent à porter atteinte à la crédibilité de la vie politique, de la personnalité de son auteur, et de sa qualité d’élu sur une partie de la période de prévention, la peine complémentaire d’inéligibilité durant trois années, sera confirmée sur le fondement de l’article 121-26 du code pénal. »