Ce que l’on doit à la vérité

Le 21 décembre, en plein conflit sur le dossier des retraites, le chef de l’État a fait savoir par la voix de ses conseillers qu’il allait renoncer à sa propre retraite de Président de la République.

L’Elysée nous précise qu’Emmanuel Macron sera ainsi le premier Président de la République à y renoncer, car il estime que cette retraite découle d’une loi de circonstance qui a vocation à être normalisée.

Que dit exactement l’article 19 de cette loi ?

Il est attribué aux anciens Présidents de la République française une dotation annuelle d’un montant égal à celui du traitement indiciaire brut d’un conseiller d’Etat en service ordinaire.

La moitié de cette dotation sera réversible sur la tête de la veuve ou, en cas de décès, sur la tête des enfants jusqu’à leur majorité.

La présente disposition prendra effet au 1er janvier 1955.

La loi du 16 juillet 1932 est abrogée.

Remettons les pendules à l’heure.

  1. Toutes les sources concordent pour attester que, si le moment venu Emmanuel Macron renonçait effectivement à cette dotation à vie, ce ne serait pas le premier Président à le faire puisque le Général de Gaulle l’avait fait en son temps.
  2. La loi du 3 avril 1955 qui a été votée sous la 4ème République n’a strictement rien d’une loi de circonstance puisque qu’elle n’est que l’adaptation à la marge de la loi du 16 juillet 1932 qui avait été votée sous la 3ème République. Elle ne fait qu’indexer la dotation qui était fixe et supprimer la mention « lorsqu’une loi aura déclaré qu’ils ont bien mérité de la patrie». Elle ne fait donc que garantir son évolution et renoncer à une décision du Parlement au cas par cas, actant en cela une évolution progressive d’un régime constitutionnellement parlementaire vers un régime qui sera un peu plus tard constitutionnellement semi-présidentiel.
  3. Il ne s’agit pas d’une pension de retraite puisqu’il s’agit bien d’une DOTATION ANNUELLE, et je n’ai connaissance d’aucun texte législatif ou réglementaire permettant de convertir cette dotation annuelle en douzièmes et de surcroit de les soumettre à des prélèvements sociaux qui seraient hypothétiquement ceux applicables à un conseiller d’Etat en service ordinaire (en activité ou en retraite).
  4. Cet avantage consenti par la Nation est de même nature que d’autres avantages réservés aux anciens chefs d’Etat (logement, voitures, personnel, déplacements, hotellerie…)
  5. Au-delà de l’effet d’annonce, la suite de l’histoire reste bien évidemment à écrire puisque, même en régime semi-présidentiel, la décision de modifier les lois n’appartient pas au Président de la République.

4 commentaires

  • LANG-BRINGER

    Il nous aura tout fait !! Et il y a des gogos de La Rem qui boivent ses paroles sans chercher à vérifier ce qu’il dit !!
    En effet, mon mari s’est tout de suite rappelé que de Gaulle avait déjà renoncé à cette dotation… mais notre Micron a la grosse tête et il ramène tout à lui ! Quel zouave !!

  • DROUET

    Ce renoncement fort opportun est peut-être justifié par le fait qu’à un moment ou à un autre, le sujet aurait été d’actualité, avec les retraites des sénateurs par exemple.

  • Je vous conseille de lire une contribution sur Médiapart qui dit les choses beaucoup mieux que moi.

    En voici un extrait :

    « Croyant par ses « sacrifices » financiers délégitimer les conflits sociaux sur le devenir des régimes des retraites, le président de la République aurait renoncé à siéger au Conseil constitutionnel et à percevoir la dotation mensuelle à laquelle il a droit à compter de la cessation de ses fonctions. Ces privilèges n’ont pourtant rien à voir avec une retraite. »

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