Un don pour le moins prématuré

De nombreuses collectivités territoriales ont annoncé leur intention d’effectuer un don au profit de la restauration de Notre-Dame de Paris, et – comme si c’était urgent – certaines en ont même déjà pris la décision, comme c’est le cas du Département d’Ille-et-Vilaine.

J’avoue que je ne vois pas comment, en l’état du droit, les décisions déjà prises ont pu ou pourraient sérieusement passer le contrôle de légalité puisque le financement par une collectivité territoriale de la restauration d’un site ou d’un monument ne se trouvant pas sur son territoire, dès lors qu’il ne répond pas à un intérêt public local, est actuellement illégal (CE, 16 juin 1997, Département de l’Oise).

Ce n’est que le projet de loi relative à la « la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet » qui est susceptible de donner un fondement légal aux dons de cette nature.

Il est vrai que la disposition envisagée n’appelle pas d’observation de la part du Conseil d’État, qu’il y a sans doute peu de chance que le Conseil Constitutionnel en soit saisi et que l’on s’achemine sans état d’âme vers une application rétroactive (voir ici l’avis *très intéressant* de la commission des finances de l’Assemblée Nationale émis le 30 avril).

Mais on peut aussi observer qu’à la réflexion, plusieurs collectivités sont déjà revenues sur leur engagement.

Et dans certaines régions, des pétitions commencent à circuler qui suspectent certains élus de surfer sur l’émotion avec « l’argent des contribuables » en faisant preuve d’une générosité… visiblement pas tout-à-fait dénuée d’arrière-pensées électorales.

Ben zut, alors… fallait-il tant se presser ?

6 commentaires

  • DROUET

    Je trouve paradoxal que le Département veuille financer la reconstruction de Notre Dame et laisse M. Pinault s’occuper financièrement de la réhabilitation de l’église de La Baussaine.

  • François Pinault qui a donné 150.000 euros pour Saint Léon de la Baussaine AVANT de donner 1.000.000 d’euros pour Notre-Dame de Paris…

  • mounier

    Degré zéro de la politique, de la démocratie et de la gestion de finances publiques !Ces élu.e.s se font plaisir à bon compte ! on voit bien ici la limite d’une démocratie qui nous permet de voter tous les 5 sans et laisse ensuite les élu.e.s prendre des décisions sans aucune conertation des citoyens. Ce don doit être annulé.

  • Pour être juste, il faut tout de même considérer qu’une enveloppe « Eglises » consacrée à la restauration et à la mise en valeur du patrimoine public religieux protégé et non protégé a été ouverte au sein du Fonds de solidarité territoriale créé en 2010 et reconduit au budget 2019 du Département, pour un montant initial de 450 000 € par an.

    Ces inscriptions budgétaires ont été abondées en 2017 d’un crédit de 300 000 € pour faire face aux travaux d’urgence sur les monuments non protégés des communes de moins de 5 000 habitants, mais je ne sais pas s’il s’agit d’une inscription pérenne.

    Le plafond annuel de subvention des nouveaux dossiers semble être de 100 000 €.

    Nature des opérations :

    – Patrimoine immobilier des églises et chapelles non protégées : étude sanitaire préalable à la restauration, travaux de couverture, charpente, maçonnerie, vitraux, peintures murales, aménagements intérieurs. Les travaux d’entretien courants (électricité, paratonnerre, chauffage, travaux sacristie…) ou concernant des éléments immobiliers protégés sont exclus de cette politique.
    – Patrimoine immobilier des églises protégées déjà prises en compte en 2011 : travaux de couverture, charpente, maçonnerie, vitraux, peintures murales, aménagements intérieurs.
    – Sont également éligibles les honoraires d’assistance à maîtrise d’ouvrage, de maîtrise d’oeuvre, de mission d’économie de la construction, les honoraires d’OPC, de mission de contrôle technique, de SPS ; les études préalables de structures et de sondages des sols.
    – Par principe, les travaux d’entretien courants (électricité, paratonnerre, chauffage, travaux sacristie…) sont exclus de cette politique. Ces travaux ne peuvent être pris en compte que s’ils s’inscrivent dans une opération de restauration globale et non dans des opérations d’entretien ou de simple mise aux normes ;
    – Patrimoine mobilier protégé et non protégé des églises et chapelles (antiquités et objets d’art tels que retables, autels, autre mobilier, statues, tableaux, orfèvrerie, cloches, bannières et textiles, etc.) : étude préalable, restauration, mise en valeur, sécurisation.
    – Orgues non protégées : restauration.

  • LANG-BRINGER Anne

    Sans compter qu’il y a négligence de l’état au sujet de la prévention des risques à Notre-Dame !! Bien sûr que c’est désolant, mais pour ma part je ne vais certainement pas contribuer !!
    Tout cet argent pour des pierres alors que des personnes (vivantes) sont dans le besoin et que les bourses ne se délient pas pour autant !

  • Pour ceux qui s’intéressent à ce sujet, voici 2 liens TRES intéressants vers des vidéos concernant le projet de loi (clic) :

    examen du projet de loi en commission des finances le 29 avril

    examen en commission des affaires culturelles le 2 mai

Tous commentaires ici bienvenus de la part des personnes assumant leur identité