Galléco : un bilan accablant

Non sans mal, j’ai fini par obtenir – à l’appui d’un courrier du 14 avril 2016 – communication d’un document intitulé « Bilan 2015 » que le Département avait demandé pour le début d’année 2016 à l’association Galléco, qui porte – à sa demande – une expérimentation de « monnaie bretillienne ».

Pour que vous puissiez le lire à tête reposée, je le dépose :

ICI

J’observe que ce document particulièrement succinct a été établi à la va vite dans la première quinzaine d’avril, et qu’il ne compte – tout habillé – que 6 pages (en réalité, et en étant très bienveillant : à peine plus de 4 sur le sujet) quand le bilan de la première année en comptait 26.

Et j’avoue que j’ai peine à comprendre comment le Département peut se satisfaire – à 6 mois de la fin de l’expérimentation – d’un document aussi bâclé (je dis bien bâclé) et aussi indigent (je dis bien indigent), au moment même où il engage des frais qu’il n’avait pas prévu pour tenter de procéder à une véritable (?) évaluation du projet (nous verrons ultérieurement ce qu’il en est).

Je rappelle qu’en contrepartie d’une subvention de fonctionnement de 339.500 euros, l’association Galléco s’est notamment engagée à assurer le suivi d’un certain nombre d’indicateurs, censés permettre d’apprécier la réussite de l’expérimentation de la « monnaie départementale complémentaire et solidaire ».

Jetons-y rapidement un œil.

  1. chiffre d’affaires réalisé en gallécos : l’association avoue son incapacité à le mesurer
  2. augmentation du chiffre d’affaires des entreprises : l’association avoue son incapacité à la mesurer
  3. le nombre de citoyens et d’entreprises adhérents (leur diversité, domiciliation) : l’un et l’autre n’ont progressé que du fait que l’association a largement débordé les territoires d’expérimentation, puisque le territoire du canton retenu de Rennes Centre (19.000 habitants en 2013) a été étendu à la ville toute entière ainsi qu’à une trentaine de communes des environs, touchant alors de l’ordre de 360.000 habitants. En toutes hypothèses, le taux d’adoption du galléco par la population du Pays de Fougères reste inférieur à 0,1 %, tandis que le taux d’adoption du galléco par la population du Pays de Redon-Bretagne Sud se situe aux alentours de 0,3 %, et que le taux d’adoption du galléco par la population des communes de Rennes et de ses environs se situe aux alentours de 0,2 %. Par ailleurs, le nombre des entreprises ayant rejoint le réseau en 2015 (71) n’est guère plus important que celui des entreprises l’ayant quitté (57). Et encore le solde (+ 14) n’est-il dû pour l’essentiel qu’à l’augmentation de prestataires du secteur de l’alimentation (+ 12), identifiés sur le territoire de Rennes et des communes environnantes qui est en forte extension géographique, et à la comptabilisation à la marge de producteurs venant pour l’essentiel au marché des lices le samedi matin y effectuer de trop modestes transactions.
  4. la masse monétaire en gallécos mise en circulation : on cherche en vain à comprendre comment est traitée la différence pourtant essentielle entre la masse monétaire mise en circulation dans l’année, estimée (semble-t-il) à 45.000 euros, et la masse monétaire en circulation (comprenant des remises en circulation, notamment à partir des comptoirs dits d’échange – et non de change – multipliés sans réel contrôle, sur la base de « prêts » consentis par l’association).
  5. la vitesse de circulation des billets : l’association avoue son incapacité à calculer cet indicateur qui est pourtant réputé être relatif à la clé de voute du système
  6. les conversions gallécos-euros : l’association avoue que les retours en banque représentent 70 % des retraits cumulés depuis le lancement de la « monnaie » en septembre 2013, ce qui constitue un réel échec puisque l’objectif poursuivi est tout simplement qu’il n’y en ait pas.
  7. la vie démocratique de l’association : les quelques indications sur la composition et le fonctionnement des instances ne constituent en rien des indicateurs de « vie démocratique ». Il eût fallu pour cela s’intéresser au respect des statuts, aux possibles conflits d’intérêts des administrateurs, au respect des décisions prises en assemblée générale, etc… autant de questions sur lesquelles il y a manifestement beaucoup à dire

J’en termine en avouant que je n’ose pas imaginer ce que nous aurions pu lire si parmi les indicateurs avaient figurés par exemple le nombre d’emplois créés ou sauvés, ou encore le montant des crédits consentis aux entreprises grâce aux euros nantis pour des projets démocratiquement choisis par les adhérents… (ouf).

Pour aller plus loin : ma contribution à l’évaluation du galléco

2 commentaires

  • Jean-Pierre Levrel

    Il y a quelques semaines, tu citais une consultation publique du CD35 en vue de réaliser une mission d’évaluation, avec propositions, du galléco. À la lumière de ce fameux « Bilan 2015 », je me demande si le département considère toujours que ce machin mérite tout cet honneur (et surtout toutes ces dépenses).

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